Co-créateur de Fallout et ancien de Troika Games (Arcanum, Vampire the Masquerade : Bloodlines), Tim Cain affirme que la violence restera le mode « d’interaction » de base dans les RPG AAA tant qu’ils se vendront !
Si on veut un jeu sans combat, on prend un jeu cozy façon Animal Crossing. Et encore, on a toujours envie de claquer le museau à ce rapace de Tom Nook. Les Walking-Simulators, jeux de sport ou jeux de simulation peuvent aussi vous forcer à ranger les haches et sortir le cerveau. Mais pour les RPG, soyons clairs : en général il s’écoule assez peu de temps avant que ça se foute joyeusement sur la tronche. Et pour cause : combattre est une base. Conquérir un monde, le besoin d’XP par le combat, le besoin de mesurer la qualité de son dernier build,… Autant d’excuses justifiant de faire appel à la fameuse politique de la mandale dans les RPG. Et il y en a une autre aussi, beaucoup plus pragmatique : la violence, ça fait vendre.
C’est d’ailleurs la conclusion de Tim Cain, co-créateur de Fallout, qui jette un pavé dans la marre. En effet, à ses yeux, la violence restera le moyen d’interaction par défaut dans les AAA RPG tant qu’on continuera à les acheter ! Il en profite également pour tordre le coup aux belles intentions des studios qui vendent ce genre de jeu. En quelques mots, pour le cite :
Les studios ne font pas ce genre de jeu parce qu’ils en ont envie. Ils le font parce qu’ils vendent.
C’est dans une vidéo de presque 14 minutes sortie le jour de l’an sur son compte YouTube qu’il évoque la question. Il y répond à la question d’un viewer qui lui demande justement si les RPG AAA se détacheront un jour de la violence comme mode d’interaction par défaut dans un monde. C’est à cette interrogation des plus intéressante qu’il lance ainsi son affirmation. Il précise d’ailleurs sa pensée ainsi :
Les studios créent des jeux – et en général des produits – que les gens achèteront. Voilà tout. Cela signifie que les jeux qui se vendent le plus, et je ne parle même pas de ceux ayant la meilleure critique, mais tout simplement de ceux ayant fait le meilleur chiffre de ventes, annonceront les jeux à venir. […] Si vous avez une entreprise qui essaie de gagner de l’argent et qu’il y a un type de jeu qui se vend à des millions d’exemplaires et un autre qui se vend à 100 000 exemplaires, lequel allez-vous choisir s’il faut autant de temps et d’argent pour les développer tous les deux ?
Certes depuis quelques années, le paysage vidéoludique se diversifie dans sa façon de concevoir l’art de s’amuser. Pour autant le RPG semble rester très conservateur. Certes il existe le genre CRPG, plus axé dialogues. Prenez Age of Decadence par exemple, un titre très austère d’Iron Tower mettant en scène un Empire Romain de fantasy. Un énième titre comme un autre? Pas vraiment ! L’histoire et les dialogues dominent. L’interface est austère, les mécaniques très précises. Et les combats ne vous changent pas en une espèce de tondeuse à gazon. Non en fait la mort peut guetter à chacun d’entre eux. Et il est même possible de finir le jeu sans combattre une seule fois ! Il devient alors littéralement une sorte de visual novel en 3D !
Pourtant et ce malgré son incroyable qualité ce jeu est absolument obscur et son succès commercial est risible. Et pourtant Iron Studio retente l’essai avec Colony Ship. Rebelotte. Échec et il est probable hélas que le studio vient de signer son dernier titre avec ce dernier. Pourquoi donc ce rejet du public? Parce que ses mécaniques ne sont pas mainstream au même titre qu’un Diablo, un Spellforce ou un Dragon Dogma. Il faut dire que les studios savent vendre leurs produits en titillant nos émotions primales. Là encore, Tim Cain l’illustre dans sa vidéo par ces termes :
Lorsque vous regardez une bande-annonce et que vous voyez des gens en train de faire des choses – sauter, grimper, tirer, donner des coups de poing – vous avez l’impression qu’on vous dit : « Whoa ! Regardez toutes les choses que vous pouvez faire dans ce jeu !!!.
Il revient notamment sur son expérience sur The Outer Worlds. En effet, l’absence de mécanique de combat au sein du jeu fut un temps préjudiciable à la stratégie marketing du jeu. Et forcément une belle histoire est plus difficile à promouvoir qu’un système de combat efficace et prenant :
Comment montrer que ce jeu a une très bonne histoire ? Comment montrer qu’il a des dialogues fantastiques ? Comment le faire dans une bande-annonce qui ne dure que 15 ou 30 secondes ? Vous devez réduire cette merveilleuse histoire, super créative et nuancée, avec un arc énorme, à une simple phrase.
Si vous souhaitez en entendre plus, voici la vidéo :
Très intéressant pavé dans la mare que Tim Caine jette ! Est-ce que le RPG peut s’affranchir de la violence comme seule rapport au monde sans perdre de son intérêt? S’il est indéniable que celle-ci restera toujours présente, il serait sans doute très intéressant de voir la formule innover vers des méthodes plus pacifiques et « intellectuelles ». Ne serait-ce que pour apporter de la nouveauté dans un genre où trucider tout ce qui ne nous revient pas est un leitmotiv vieux comme le monde !